Dessin Thiriet
- Vendredi 14 janvier 2011
- Publie dans "Dessin"
- Par handicapé-méchant
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J’ai un peu de retard sur mes publications pour cause de partiels, mais maintenant que c’est fait plus d’excuse. Donc voici de dessin que m’a fait Thiriet. Alors il est un peu hors-sujet mais on s’en fout. Et il rentre en contradiction avec mon précédent article, et ça c’est cool.
Même s’il parle d’intégration, il soulève un point important, comment un valide doit agir avec un « à roulettes », pas forcément évident. On peut le lire dans Fluide Glacial et Spirou…
J’ai découvert il y a quelques temps ton blog et j’avais d’ailleurs posté un commentaire pour saluer ta démarche… Depuis quelques temps il a trouvé un autre écho chez moi, hélas.
Ma cousine a été fauché sur l’autoroute alors qu’elle portait secours à sa mère, victime d’un premier accident en série. En plus de perdre sa mère, elle a également perdu une jambe.
Je me rends compte aujourd’hui de deux choses que je retrouve dans tes précédents billets.
Elle se retrouve handicapée, elle doit se reconstruire et j’ai le sentiment que tout le travail de sa rééducation passe d’une part par l’acceptation de sa nouvelle condition mais également, par la nécessité de s’intégrer aux « valides ». Pourquoi cette exigence d’intégration ?
Je me sens également totalement impuissant et effectivement, à l’instar de l’entourage je me rends compte que mon regard change, bien involontairement. J’enrage de cet accident, j’enrage de la voir dans cet état et dans le même temps je m’en veux énormément de changer mon regard, même si j’ai encore du mal à définir exactement ce que je mets derrière celui-ci. De la compassion ? De la « pitié » ? Un simple sentiment d’impuissance ? Comme l’indique Chomp’, de la gêne et parfois des silences quand elle pleure qui sont autant de maladresses.
Alors je vais tâcher de répondre à tes questions dans l’ordre selon lesquelles tu les poses, mais ce n’est que mon avis. Cette exigence d’intégration vient du fait que tout dans ce monde rappelle qu’il n’ai pas fait pour nous ,les « handicapés » en particulier et en général tous ceux qui ne rentrent pas dans des cases. Donc si l’on veut vivre normalement on veut de prime abord faire partie d’un monde que l’on considère comme valide. On nous fait bien comprendre que si on veut être aidé va falloir s’adapter aux normes « validistes ». Je pense que cette volonté de s’intégrer aux valides c’est que ta cousine ne se considère pas comme handicapée, ce qui est mon cas, mais le truc c’est qu’il faut avoir conscience des limites d’un corps limité physiquement. C’est normal que ton regard change mais il faut essayer de comprendre que être debout change ta vision du monde. Les marches ne t’interpellent pas, tu ne peux pas voir tous les obstacles de la vie de tout les jours. Je pense que c’est un conditionnement. En tout cas la compassion me fais gerber personnellement. Le Graal si tu veux c’est de ne pas considérer la personne en fauteuil comme handicapée mais de savoir comment l’aider. Ton sentiment d’impuissance est assez répandu dans les entourages de personnes handicapées, mais ça passe ! Je dis ça mais je sais que c’est bien joli sur le papier. Se construire avec un corps nouvellement handicapé prend du temps et ce n’est pas une situation que j’ai connu, vu que ma maladie est progressive…
En tout cas j’espère que cette réponse te sera utile…
Je comprends mieux ce que tu appelles « intégration » avec ces éclaircissements…
Je suis bien d’accord avec toi qu’être debout change la vision que l’on a des choses, j’en ai seulement pris plus concrètement conscience avec son accident et c’est une sacré claque pour moi. Ca m’a confirmé ce que je savais déjà : la conscience n’est pas forcément inée et les déclarations de principes ne valent finalement pas grand chose une fois en situation…
Pour la « compassion » ce n’est pas ce que je ressens, en tout cas je ne le vis pas comme tel. J’essaye justement d’y voir clair dans mon ressenti de tout ça et c’est tellement flou que je n’arrive pas à y mettre des mots mais pas plus d’être certains de ce qu’il y a derrière ces émotions. D’où ma référence à la compassion, la pitié, etc. Et si c’était finalement ce que je ressentais sans oser l’admettre ? Voilà qui me donne une bien piètre opinion de moi-même !
J’ai toujours eu le discours « on peut être différent mais cela ne change rien dans l’approche de l’autre » et effectivement, en croisant des « à roulettes » je ne pense pas avoir adopter une attitude condescendante ou de compassion… Je constate en fait que je suis bien moins à l’aise que je ne le pensai sur le sujet une fois que cela me touche de plus près et d’où un sentiment de culpabilité.
Merci de ta réponse, elle me permet de cheminer un peu plus dans ma remise en question…
J’aime bien ton nouveau dessin, il me parle aussi d’une autre situation que je connais. Depuis mon adolescence les gens se tordent souvent le cou pour me parler (moi aussi, d’ailleurs : trop grand !), alors j’ai appris très tôt à descendre du trottoir pour faciliter la conversation
Du coup j’ai pas eu besoin que mes potes à roulettes me le disent pour attraper une chaise quand on discutaient.
Sinon, ces partiels ?
Bah, faut être simple et demander.
Un truc enseigné par un-e « à roulettes » peut servir par la suite dans tous les cas similaires.
Evidemment faut pas avoir peur du « à roulettes », dont on imagine volontiers qu’il soit gavé par toujours les même problèmes, les mêmes fausses notes, les mêmes gênes, les mêmes maladresses…
L’ « à roulette » de son côté doit se reconnaître un devoir de pédagogie : il lui faut lui aussi piger que l’autre ne peut souvent pas deviner les caractéristiques et effets exactes de la maladie ou du handicap.
Question de contact, je pense : si l’ « à pattes » et « l’à roulettes » entrent en relation sans chichis, noeuds au cerveau, etc, les trucs doivent s’apprendre tout seuls.
Y me semble.
Que chacun-e se rappelle du droit à l’erreur de l’autre, et fasse marcher (ou rouler) son sens pratique.
Et hop.
Non ?
Carrément Chomp, tu as bien résumé la situation…
L’a qu’à utiliser son lift !
Il me semble avoir déjà entendu ça quelque part…